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Crédit photo : Christine Coquilleau
En cette journée du 8 mars (journée des droits de la femme), quel thème aurait été plus approprié que celui de la liberté de la femme artiste ? Hasard du calendrier, c’est le jour où j’ai découvert le superbe spectacle de l’Australienne Wendy Beckett sur la vie et l’œuvre de Camille Claudel.
Claudel, l’ambitieuse, la passionnée, la créatrice, remarquée par Rodin pour son talent hors norme. Mais aussi Claudel la rebelle, l’indomptable, la tourmentée, celle par qui le scandale arrive… Une figure de femme libre, si inacceptable dans le contexte de la France conservatrice de la fin du XIXe siècle que sa propre famille la fera interner pour « protéger sa réputation ». La force du récit et de la mise en scène de Wendy Beckett est de montrer la fusion entre la vie et l’œuvre de cette artiste si douée.
Corps et mouvement
Le corps, la chair, son expressivité, sa sensualité… Cette fascination pour le corps et tout ce qui le meut (muscles, tendons, etc.) – trait commun au travail de Claudel et de Rodin – est le ressort principal du spectacle. La metteuse en scène a eu l’idée géniale de collaborer avec Meryl Tankard, chorégraphe reconnue au niveau international et danseuse principale du Pina Bausch Wuppertal Dance Theatre.
Grâce à elle, les événements clés de la vie de Camille, comme ses créations, prennent forme sous nos yeux par l’intermédiaire des danseurs (deux femmes et un homme), qui, tout au long du spectacle, se transforment en fascinantes sculptures vivantes. L’Abandon, L’Âge mûr, La Valse… autant de compositions emblématiques de l’artiste, où s’exprime sa maîtrise des attitudes humaines et où émergent ses questionnements sur l’amour, la mort et la destinée.
Beauté et émotion
Les personnages évoluent dans un décor sobre mais magnifique, constitué de lourdes tentures, qui évoque l’atelier. Les tonalités neutres comme le gris et le crème prédominent, renvoyant à la matière si chère aux sculpteurs, argile, plâtre et marbre. Le jeu subtil des lumières, la beauté des costumes, l’expressivité contrôlée des danseurs, l’ensemble contribue à créer une atmosphère intimiste et envoûtante.
Célia Caralifo campe une Camille Claudel captivante, tout en intensité et en sensualité. Elle se montre tour à tour déterminée et fragile, rebelle et tendre, volontaire et désespérée. Face à elle, Swan Demarsan est un Rodin charismatique. Les autres acteurs sont tout aussi convaincants, que ce soit Clovis Fouin dans le rôle ambigu de Paul Claudel – pris en tenaille entre sa sœur et sa famille –, ou Christine Gagnepain dans celui de la mère prête à sacrifier sa fille aux conventions sociales.
Vous l’aurez compris, c’est un très bel hommage à celle dont le talent et la liberté furent si injustement muselés par la société et sa propre famille.
On sort de la salle avec l’envie folle de courir admirer ses œuvres dans le musée qui porte son nom, ouvert il y a un an… plus de soixante-dix ans après sa mort. Il était temps.
Véronique Tran Vinh
Du 7 au 24 mars 2018
Athénée Théâtre Louis-Jouvet
7, rue Boudreau
75009 Paris
http://athenee-theatre.com
Écrit et mis en scène par Wendy Beckett
Assistée d’Audrey Jean
Chorégraphies de Meryl Tankard
Assistée de Mariko AOYAMA
Scénographie de Halcyon Pratt
Projections de Régis Lansac
Costumes de Sylvie Skinazi
Lumières de François Leneveu
Les comédiens
Célia Catalifo, Marie-France Alvarez, Marie Brugière, Swan Demarsan, Clovis Fouin, Christine Gagnepain
Les danseurs
Sébastien Dumont, Audrey Evalaum, Mathilde Rance