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Une cabane en planches, un poêle qui rougeoie doucement au milieu de la pièce, des rayonnages de livres et des bouteilles de vodka… voici l’ermitage en Sibérie, près du lac Baïkal, où l’écrivain voyageur Sylvain Tesson a choisi de se retirer pour six mois, loin de la folie urbaine et de la foule, dans le froid glacial de la taïga. Une retraite volontaire, dans laquelle l’écrivain cherche à se ressourcer auprès de la nature.
Un froid sibérien qui réchauffe le cœur
La nature, omniprésente, mais que l’on ne voit jamais, rythme la vie de cet « ermite » (comme Tesson aime à se désigner). Les jeux de lumière permettent de créer des atmosphères différentes dans la cabane en fonction des moments de la journée : le rayon de soleil qui vient balayer l’intérieur, l’obscurité qui s’installe quand la nuit tombe, les éclairs de tempête qui cernent parfois le refuge de l’écrivain.
Des bruitages évoquent la violence des éléments naturels au dehors, le vent, le froid, la neige, accentuant encore l’impression d’isolement. Cet isolement que l’écrivain recherche ardemment pour plonger au plus profond de lui-même, comme pour se ressourcer dans le silence et les mots, qu’il lit ou qu’il écrit. Ses occupations sont d’une grande simplicité : contempler le paysage de sa fenêtre, consigner ses impressions dans un journal, fendre le bois, pêcher, marcher dans la forêt. Son émerveillement lors de la visite d’une mésange dans son refuge en dit long sur ce qu’il ressent.
Un homme en quête d’absolu
William Mesguich est troublant de vérité dans le rôle de Sylvain Tesson. Tour à tour drôle, sombre ou touchant, il nous fait entrer dans les pensées de l’aventurier et partager la sensation de dépouillement, de vide total qui lui permet de se fondre dans la nature et de percevoir le fourmillement du monde animal et végétal qui l’entoure. Les fidèles compagnons que sont les livres et la vodka (qu’il consomme sans modération) l’aident à aiguiser ses perceptions.
Dans ce seul en scène, la magie de la mise en scène et l’interprétation de William Mesguich nous entraînent au fin fond de la Sibérie, aux côtés de l’écrivain voyageur, dans sa quête de beauté et d’absolu. Nous ressentons le froid qui le mord, le vent qui le fouette, nous sommes fascinés comme lui par l’éclat sombre des eaux de la Baïkal et effrayés par la nuit qui s’abat sur la taïga. Nous sommes touchés en plein cœur par la lettre de rupture qu’il reçoit dans son ermitage et qui l’éprouve une fois de plus.
Une expérience extrême, mais surtout une belle aventure humaine, qui pose des questions fondamentales : comment apprivoiser le temps ? Comment se confronter à soi-même ? Peut-on vivre loin de ses semblables ?
Un beau spectacle, à la fois intime et universel, porté par un acteur intense.
Véronique Tran Vinh
D’après le livre de Sylvain Tesson
Mise en scène et jeu William Mesguich
Collaboration artistique Estelle Andrea
Adaptation Charlotte Escamez
Création sonore Maxime Richelme
Création lumière Richard Arselin
Scénographie Grégoire Lemoine
Régie Yves Thuillier
Théâtre de la Huchette
23, rue de la Huchette
75005 Paris
http://www.theatre-huchette.com/dans-les-forets-de-siberie/
Du mardi au vendredi à 21 h 00, le samedi à 16 h et 21 h.
Relâches : le mardi 19 novembre, le jeudi 21 novembre 2019, mardi 24 décembre et le mercredi 1er janvier.