“Inoxydables”, au TNP Villeurbanne

© Michel Cavalca

Au son du groupe de Rock Métal Klone, nous voici invités dans un concert. La musique live envahit la scène dans les vapeurs d’alcool et de cigarettes. On y est.

Sil joue de la basse. Mia danse. Leurs regards se croisent et c’est le coup de foudre. Ils restent collés l’un à l’autre toute la soirée et débute ainsi une relation… inoxydable.

Dehors, on entend des explosions… Y’a la guerre mais la musique et l’amour isolent et protègent le groupe et le couple, loin du fracas du monde.

La réalité finit par les rattraper. Le groupe éclate.

Malgré leurs réticences, Sil et Mia sont obligés de partir, de fuir ce pays où chacun est devenu une cible.

Commence alors la longue et douloureuse fuite, frontière après frontière, arrestation après arrestation, longue marche, escalade, froid, soif, chaleur, faim, saleté, échec après échec.

Et toujours la musique.

Et toujours leur amour inoxydable.

Ils continuent d’avancer, ils recommencent leur périple pour trouver la sécurité, nécessaire à la vie.

Dans ce théâtre, que la compagnie En Acte(s) qualifie d’immersif, la pièce nous emmène loin. Nous sommes avec Sil et Mia, nous courons avec eux, nous sautons les murs avec eux, nous ressentons leur faim, leur soif… leur espoir.

La force du texte de Julie Ménard trouve son expression la plus aboutie grâce à une mise en scène économe de moyens mais pas de ressentis. Maxime Mansion saisit la note juste pour provoquer notre empathie. On ne sait pas où l’on est, mais on se dit que ça peut arriver n’importe où, y compris en France.

Le thème de l’exil trouve ici une voie – et une voix – inattendue dans l’univers du rock métal… Magnifiques comédiens, Juliette Savary et Antoine Amblard, qui incarnent les deux amants, si vrais, si beaux de tant d’imperfections, de tant d’humanité.

À la fin du spectacle, toujours accompagné du groupe Klone, une explosion d’émotions nous submerge et l’on se dit : « Eux, c’est nous ! »

Plûme

Texte Julie Ménard
Mise en scène Maxime Mansion
Musique live – metal progressif groupe Klone
avec Antoine Amblard et Juliette Savary
création musicale et musique live Guillaume Bernard, Aldrick Guadagnino et Yann Ligner, fondateurs du groupe Klone
création sonore Quentin Dumay
création lumière Lucas Delachaux
scénographie Amandine Livet
costumes Paul Andriamanana Rasoamiaramanana
production Mathilde Gamon
production EN ACTE(S)
coproduction Théâtre National Populaire
avec le soutien de La Mouche – Saint-Genis-Laval

Jusqu’au 6 avril
Mardi 2, mercredi 3, vendredi 5 et samedi 6 avril
à 20 h 30
Théâtre national populaire
8, place Lazare-Goujon
69627 Villeurbanne cedex
04 78 03 30 00

 

“Love, Love, Love”, au théâtre Jean Vilar

© Pierre Nouvel

Et les Beatles chantaient :
All you need is love
All you need is love, love,
Love is all you need.

Cinquante ans plus tard, que reste-t-il des années Peace and Love et de leurs utopies, et notamment, du rêve d’une société meilleure, plus libre et plus fraternelle ? C’est le sujet qu’aborde Mike Bartlett, jeune dramaturge britannique, à travers ce portrait au vitriol d’une famille sur plusieurs décennies.

1967 –1990 – 2011 : trois dates clés de l’évolution de la société anglaise et de la vie de Kenneth et Sarah, jeune couple qui se forme à l’époque du Swinging London. Animés par les mêmes valeurs libertaires et l’envie de changer le monde, ils tombent amoureux et se marient. On les retrouve vingt-trois ans plus tard, flanqués de deux enfants, Rose et Jamie, dans la banlieue bourgeoise où ils habitent. Débordés par leur travail et l’éducation de leurs enfants, ils se déchirent sur fond d’alcoolisme – à peine – mondain et d’individualisme forcené, avant de se séparer. Puis ce sont les années 2000, début de l’incertitude politique et sociale. Les deux ex-soixante-huitards, qui ont sacrifié leurs idéaux sur l’autel de la réussite matérielle, coulent une retraite dorée chacun de leur côté. Quant à leurs enfants, livrés à eux-mêmes, ils tentent tant bien que mal de donner un sens à leur vie.

Avec un humour grinçant, Mike Bartlett pointe avec justesse les travers de ces deux éternels adolescents – en âge d’être ses propres parents ? –, qui n’ont conservé des valeurs de leur jeunesse que le sens de la dérision et l’amour de la liberté (pour eux-mêmes surtout !). La scénographie, réduite à l’essentiel, s’appuie sur quelques vidéos et nous permet de nous concentrer sur les dialogues, au rythme enlevé. Chaque changement de musique nous transporte dans une autre époque. Quant aux quatre jeunes comédiens, ils donnent vie à leurs personnages avec brio.

Que l’on appartienne à la génération des enfants ou à celle des parents, cette pièce nous interroge avec lucidité et humour sur la transmission familiale et la perte des utopies… Et si on réinventait le monde ?

Véronique Tran Vinh

Une pièce de : Mike Bartlett
Traduction : Blandine Pélissier & Kelly Rivière
Mise en scène : Nora Granovsky
Avec : Émile Falk-Blin, Jeanne Lepers, Bertrand Poncet et Juliette Savary
Création vidéo et scénographie : Pierre Nouvel
Lumières : Fabien Sanchez
Costumes : Nora Granovsky

Dates des prochaines représentations :
Amiens – Comédie de Picardie
23 et 24 novembre à 20 h 30
28 novembre à 14 h 15 et 20 h 30
29 novembre à 19 h 30

Bruay-la-Buissière – Centre culturel
14 décembre à 14 h 30
15 décembre à 14 h 30 et 20 h

 Alès – Le Cratère
6 et 7 février 2018 à 20 h 30